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Kankasia

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Alexandre Batte

Compositeur et trompettiste cubain, fondateur et directeur du groupe Kabiocile, fait partie de ces Montreuillois d’adoption.

Un visage changeant, avec parfois la bouille souriante du copain fidèle ou du papa gâteau lorsqu'il joue avec son fils, à d’autres moment un air d’intellectuel radical newyorkais lorsqu’il met ses lunettes cerclés pour parler de son oeuvre, enfin un petit quelque chose de Louis Armstrong jeune lorsqu’il met la trompette à la bouche

Une musique assez nettement ancrée dans le style Timba, mais plus romantique, moins âpre et plus métissée que celle à laquelle nous ont habitué les groupes actuels les plus emblématiques de la Havane, comme

Habana d’Primera ou Los Van Van. Rares sont en effet les morceaux de l’album où ne se glisse pas une référence appuyée à d’autres styles aux sonorités très variées, comme le Jazz funk dans Los monstruos cubanos, le rap dans Ahora que quieres, l’Afro-cubain dans La Rumba la Pongo yo, le Reggae dans Que tiene mi Habana.

Certains morceaux d’ailleurs, se situent même entièrement à l’extérieur de la mouvance Timba, comme par l’exemple Marchemos Juntos una Vez, de pur style feeling, ou encore Ache Yemaya, associant rythmes Yoruba et sonorités de l’Oriente Cubain.

Le groupe pratique également le style salsa romantique, avec de belles paroles d’amour portées par des mélodies très expressives, comme dans Tu eres de Anja ou Grande Ligas… Quant à Un verano en Paris, il juxtapose des rythmiques très diverses : Funk, Chachacha, Afro-cubain, rap… Kabiocile nous invite ainsi à un vaste parcours musical à travers les styles musicaux des caraïbes et du nouveau monde, qui prend le risque de désorienter un public conservateur habitué aux délimitations figées, mais qui m’a séduit par ses sonorités originales et toniques.

Ce métissage stylistique s’explique sans doute en partie la diversité des rivages musicaux auxquels a abordé Alexander Batte, compositeur et auteur de la plupart de ces thèmes. Celui-ci, né a Guanabacoa – encore un rejeton de ce quartier de la périphérie de la Havane, véritable conservatoire à ciel ouvert de la culture populaire afro-cubaine, où l’on dit volontiers que sous chaque pierre, on trouve un musicien – a d’abord suivi une double formation, familiale et académique. « Mon père était trompettiste. C’est lui qui m’a donné le goût de cet instrument. Et mon grand’père, qui était fils d’Oggun, m’amenait dans les fêtes religieuses. J’allais aussi aux fêtes de rumba du quartier. C’est là que j’ai appris à jouer des congas, à danser. ».

Mais Alexander fréquente aussi les écoles de musiques classique Felix Varela et Gerald Delgado Guanche, où il suit jusqu’en 2001 un cursus académique d’instrumentiste, tout en intégrant en tant que trompette, la Banda provincial de conciertos.

En même temps il fréquente les orchestres de Timba où il joue de temps à autres, se passionne la pop américaine pour le Funk-jazz. Mais c’est la rencontre avec le célèbre jazzman cubain Bobby Carcasses, trompettiste et chanteur, qui l’intègre dans sa formation et l’initie aux arcanes de la composition et de l’improvisation Jazz.

C’est donc déjà muni d’une formation très complète qu’Alexander débarque en France en 2002 à 25 ans. Là, il fréquente assidûment le conservatoire Nadia et Lili Boulanger et intègre son Big band de Jazz, où il rencontre d’autres musiciens cubains et européens avec lesquels il va bientôt former, dès 2004-2005, le groupe Kabiocile. A l’époque il s’agit plutôt d’une petite formation de latin Jazz, malgré son nom qui fait directement référence à la mythologie Yoruba. Kabiocile est une parole d’origine africaine utilisée pour saluer respectueusement Chango, Dieu de la guerre et des tambours. Cela signifie à peu près « hommage à votre majesté. »

Puis le groupe Kabiocile va évoluer, vers le début des années 2000, du Jazz vers la Timba cubaine. Une transformation qui s’est aussi traduite par un élargissement de la formation. « J’ai voulu prendre le risque de faire un groupe de vraie Timba cubaine, et pas seulement une petite formation de 4 ou 5 musiciens.
J’avais déjà écrit des morceaux instrumentaux que je voulais jouer.
J’aimais bien chanter aussi pendant les tumbaos, et les musiciens m’ont dit « pourquoi n’écris-tu pas des chansons de Salsa ? ».

Pour constituer le groupe, Alexander puise dans le vivier de ses amitiés musicales Comme le pianiste Daniel Stawinski , partenaire d’autres formation où joue Alexander, le bassiste cubain Felix Toca et le tresero Felix Manresa, le batteur Abraham Mansfarrol, le chanteur Elvis Ponce et la chanteuse Martha Galarraga.

Chacun de ces interprètes a amené avec lui son propre bagage artistique, contribuant à enrichir le registre esthétique du groupe, comme l’explique Alexander dans un langage culinaire très imagé : « Avec mes compositions, j’amène la matière première, les légumes, les saucisses. Cela représente 80 % du plat.
Mais pour le reste, ces sont les interprètes qui préparent la sauce.
C’est pour cela qu’il y a tant de diversité dans ma musique, avec des apports Funk, Jazz, Timba, Son, etc.»

Depuis sa création, le groupe a déjà pas mal tourné. « Un orchestre de 12 musiciens peut faire peur aux organisateurs, explique Alexander. De plus, ma musique est une musique de création, de mélange.